Comprendre et utiliser l'Indice de gravité de la criminalité

L'Indice de gravité de la criminalité (IGC) est une mesure sommaire du volume et de la gravité des crimes déclarés par la police dans une région donnée — une ville, une province ou un territoire, ou le pays.

Cependant, l'IGC n'est pas conçu pour être utilisé seul ni comme indicateur universel de la sécurité communautaire. Ce document met en évidence les origines de l'IGC et souligne l'importance de l'interpréter en complément d'autres sources de données pour mieux comprendre la criminalité dans une région donnée.

Une méthodologie plus détaillée et des publications de référence sont également présentées à la fin de ce document.

Les origines de l'Indice de gravité de la criminalité

Depuis les années 1960, le taux de criminalité traditionnel est utilisé pour comprendre les crimes déclarés par la police dans le cadre du Programme de déclaration uniforme de la criminalité (DUC)Note de bas de page 1.

L'Indice de gravité de la criminalité (IGC) a été mis au point en 2009 comme mesure complémentaire au taux de criminalité traditionnel et aux données sur la victimisation autodéclaréeNote de bas de page 2. Il s'agissait du premier grand changement , en près de 50 ans, à la façon dont Statistique Canada examine les renseignements déclarés par la police.

L'IGC est destiné à être l'une des nombreuses sources d'information qui peuvent être utilisées pour mieux comprendre la nature évolutive de la criminalité au Canada.

La combinaison de renseignements provenant de différentes sources permet de mieux comprendre les problèmes complexes. Par exemple, il existe de nombreuses façons d'examiner la criminalité, notamment à l'aide des données sur les crimes déclarés par la police, des données des tribunaux et des services correctionnels, des données des ressources policières, ainsi que des données d'enquête sur la victimisation autodéclarée et les perceptions à l'égard de la sécurité et de la confiance envers les institutions.

Chaque source offre une façon particulière de comprendre la criminalité et, en combinaison avec d'autres indicateurs et sources d'information, la société.

Mesurer les crimes déclarés par la police à l'aide de l'Indice de gravité de la criminalitéNote de bas de page 3

Le taux de criminalité traditionnel est calculé en additionnant le nombre de crimes déclarés par la police pour une période et une région géographique données, puis en divisant ce total par le nombre d'habitants de la région. Par conséquent, chaque crime a la même incidence sur le taux de criminalité — par exemple, un meurtre a la même incidence qu'un vol.

Généralement, les crimes plus fréquents mais moins graves ont la plus forte incidence sur le taux de criminalité.

Bien que le taux de criminalité traditionnel soit une mesure utile du volume de crimes portés à l'attention de la police au fil du temps, et donc contribuant à notre compréhension de la charge de travail de la police et des demandes sur le système judiciaire, il n'est pas aussi efficace pour refléter les changements concernant les crimes moins fréquents mais plus graves.

L'IGC a été mis au point pour répondre aux limites du taux de criminalité traditionnel, puisqu'il est fondé à la fois sur le nombre et la gravité relative des crimes. Il est utilisé pour suivre les changements au fil du temps.

En fait, il existe trois indices connexes — l'IGC global, l'IGC avec violence et l'IGC sans violence — qui permettent d'examiner différents types de crimes. Un IGC est également calculé pour les jeunes auteurs présumés de crimes.

Mesurer — ou pondérer — la gravité des crimes

Pour calculer l'IGC, on attribue à chaque type de crime un poids qui représente sa gravité relative. Ensuite, le nombre d'affaires déclarées par la police pour un type de crime donné est multiplié par le poids attribué au type de crime en question. Les poids attribués sont fondés sur des renseignements normalisés tirés des données sur les peines imposées par les tribunaux au cours des cinq années précédentesNote de bas de page 4.

Les crimes qui sont plus susceptibles d'entraîner une peine d'emprisonnement et des peines plus longues se voient attribuer un poids plus élevé.

Par exemple : Selon le taux de criminalité traditionnel, un vol de biens a la même incidence sur le taux de criminalité qu'un meurtre. Une affaire de meurtre a donc un poids équivalent à une affaire de vol de biens.

Cependant, selon l'Indice de gravité de la criminalité, le meurtre a un poids de plus de 8 200, tandis que le vol de biens a un poids de 29Note de bas de page 5. Ainsi, l'incidence d'un meurtre sur l'IGC est environ 280 fois plus importante que celle d'un vol de biens.

Selon l'IGC, le meurtre au premier degré a un poids beaucoup plus lourd que le vol de biens, soulignant sa gravité, même s'il se produit beaucoup moins fréquemment. Ainsi, l'IGC reflétera mieux l'incidence d'un changement dans la fréquence des meurtres au premier degré que le taux de criminalité traditionnel, selon lequel ce changement pourrait passer inaperçu.

Autrement dit, l'IGC est l'un des moyens utilisés pour refléter plus précisément les changements dans les cas de crimes plus graves mais moins fréquents dans une région, tandis que les changements dans les crimes moins graves auront moins d'incidence sur l'IGC que sur le taux de criminalité. On obtient ainsi une image plus complète et nuancée de la criminalité, surtout lorsque l'IGC est combiné à d'autres mesures de la criminalité.

L'IGC permet également de comparer les changements en matière de la criminalité au fil du temps et partout au Canada lorsque les circonstances uniques de chaque région sont prises en compte, telles que le nombre d'habitants, la répartition selon l'âge et le sexe, les possibilités d'emploi et les salaires, le niveau d'éloignement et la disponibilité des services, entre autres.

Nous pouvons alors interpréter la variation de l'IGC dans le contexte d'autres indicateurs.

Comme tout indicateur social, économique ou environnemental individuel, d'autres sources d'information complémentaires, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du système de justice pénale, doivent également être prises en compteNote de bas de page 6 pour dresser un tableau complet de la criminalité et de la sécurité dans une région.

L'Indice de gravité de la criminalité a été mis au point en collaboration avec des partenaires et le public et est utilisé pour mesurer les objectifs de développement durable

L'IGC est une mesure normalisée et uniforme de la criminalité et un indicateur clé pour le pays. Il est fondé sur les données normalisées tirées du Programme DUC, un recensement de tous les crimes déclarés par la police au Canada.

Un travail approfondi de consultation et de développement garantit que l'IGC est méthodologiquement solide, facile à comprendre et robuste face aux changements en matière de criminalité.

L'IGC est également un indicateur dans le Cadre d'indicateurs canadien pour les objectifs de développement durablesNote de bas de page 7, une initiative internationale visant à atteindre un avenir plus durable et équitable. C'est aussi un indicateur clé dans le Cadre de qualité de vie pour le CanadaNote de bas de page 8, qui rassemble des données sur le bien-être des Canadiens et des Canadiennes.

À ce titre, l'IGC n'est qu'un élément d'un tableau bien plus vaste qui aide les Canadiens et les Canadiennes à mieux comprendre le pays — sa population, ses ressources, son économie, son environnement, sa société et sa culture.

Principaux éléments à prendre en considération lors de l'utilisation de l'Indice de gravité de la criminalité

À la base, l'IGC est une mesure des crimes déclarés par la police dans une région précise. Il tient compte de la gravité pondérée de chaque crime déclaré, par rapport aux chiffres de population du recensement dans la région, exprimée pour 100 000 habitants.

La variation de la population

Les chiffres de population utilisés pour calculer l'IGC sont dérivés du Recensement de la population effectué tous les cinq ansNote de bas de page 9. Cependant, les populations peuvent être dynamiques, en particulier dans les régions où l'économie est largement tributaire d'une activité saisonnière comme le tourisme, ou de certaines activités commerciales ou de passages frontaliersNote de bas de page 10.

Certaines régions peuvent également connaître une plus grande mobilité de la population en raison de plusieurs facteurs, tels que le marché du travail local, les coûts du logement, l'emplacement (ville, village, région éloignée) et la présence ou l'absence de services communautaires dans ces régions.

Ces caractéristiques de la population doivent également être prises en compte lors de l'interprétation des tendances de la criminalité.

Les crimes non déclarés ne sont pas couverts par l'IGC

Les données sous-jacentes tirées du Programme DUC constituent un recensement de tous les crimes portés à l'attention de la police au Canada.

Les données font l'objet d'une vérification rigoureuse de la qualité et sont fondées sur un manuel de déclaration normalisé pour les statistiques nationales sur la criminalitéNote de bas de page 11.

Cependant, ces données ne permettent pas de rendre compte des crimes qui ne sont pas signalés à la police.

L'IGC est mis à jour régulièrement pour refléter les modifications apportées aux lois et aux peines imposées

Des changements particuliers dans les pratiques policières, les ressources policièresNote de bas de page 12, les campagnes de sensibilisation du publicNote de bas de page 13, les initiatives policières visant à lutter contre des types précis de crimeNote de bas de page 14, et la relation entre le public et la police peuvent également avoir une incidence sur les données du Programme DUC.

Les poids de l'IGC sont régulièrement mis à jour pour refléter les modifications apportées aux lois et aux peines imposées par les tribunaux canadiensNote de bas de page 15.

Les poids utilisés pour calculer l'IGC sont ajustés tous les cinq ans, et la méthodologie sous-jacente employée pour compter les crimes est révisée pour s'assurer que les modifications législatives, ainsi que les changements dans la déclaration des crimes et les pratiques des tribunaux sont pris en compteNote de bas de page 16.

Examiner l'IGC en mettant l'accent sur la diversité

En tant que mesure fondée sur la région, l'IGC ne prend pas en compte les caractéristiques démographiques particulières de chaque région ni la façon dont différents groupes de personnes dans une région peuvent être victimes de préjudice ou de discrimination.

Par exemple, les membres des Premières Nations, les Métis et les Inuit sont depuis longtemps surreprésentés parmi les victimes d'homicideNote de bas de page 17, les victimes de violence autodéclaréesNote de bas de page 18 et dans le système de justice pénaleNote de bas de page 19Note de bas de page 20. Le colonialisme, la dépossession territoriale, la marginalisation socioéconomique et la discrimination systémique ont été identifiés comme des facteurs contribuant grandement à la surreprésentation des Autochtones dans le système de justice pénaleNote de bas de page 21.

Disposition relative aux peines imposées aux Autochtones

Le gouvernement, le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire canadiens ont cherché à remédier à la surreprésentation des Autochtones dans le système judiciaire canadien au fil du tempsNote de bas de page 22. Plus précisément, l'alinéa 718. 2e) du Code criminel, ajouté en 1996, prévoit « l'examen, plus particulièrement en ce qui concerne les délinquants autochtones, de toutes les sanctions substitutives qui sont raisonnables dans les circonstances et qui tiennent compte du tort causé aux victimes ou à la collectivité », et ce, avant que le tribunal détermine la peine à infliger.

Cette disposition relative aux peines imposées a été interprétée pour la première fois dans l'affaire R. c. Gladue (l'« arrêt Gladue ») en 1999. Selon la décision de la Cour suprême dans l'arrêt Gladue , les tribunaux doivent tenir compte des circonstances uniques des délinquants autochtones lors de la détermination de la peine. La décision a permis d'établir un cadre pour aider les juges à déterminer la peine à infliger aux délinquants autochtones. Cela a conduit à l'utilisation recommandée des « rapports Gladue », qui fournissent des renseignements de base sur un délinquant pour aider à une détermination de peine appropriée.

Diverses critiques et préoccupations concernant l'application de l'arrêt Gladue ont ensuite été soulevées. En 2012, dans R. c. Ipeelee, la Cour suprême a réaffirmé son engagement envers les principes énoncés dans Gladue, a abordé un certain nombre de critiques et a clarifié des préoccupations. La Cour suprême a également reconnu que le système de justice pénale portait une part de responsabilité dans les infractions discutées dans l'affaireNote de bas de page 23.

Les peuples autochtones rapportent également des niveaux de confiance plus faibles envers la policeNote de bas de page 24 et sont plus susceptibles de déclarer avoir subi de la discrimination lors de leurs interactions avec la police que leurs homologues non autochtonesNote de bas de page 25.

Des appels ont été lancés pour lutter contre le racisme systémique dans les services de police et améliorer la relation entre la police et les peuples autochtonesNote de bas de page 26.

Cependant, les mesures régionales de la criminalité peuvent potentiellement occulter des problèmes systémiques complexes dans une région ou entre différents groupes de personnes, ou elles peuvent refléter ces problèmes sous-jacents.

Par exemple, l'IGC ne tient pas compte du contexte socioéconomique particulier d'une région ou de la présence ou de l'absence de services communautaires qui peuvent influer sur les interventions de la police dans une région donnée.

Il est donc essentiel de considérer un contexte supplémentaire pour mieux comprendre l'expérience vécue des personnes dans la région.

L'avant-propos de la Stratégie canadienne de lutte contre le racismeNote de bas de page 27 reconnaît que les expériences de racisme et de discrimination au sein des communautés racisées et des peuples autochtones peuvent varier. « L'application d'une optique intersectionnelle révèle une image complexe de la façon dont différents groupes et individus sont exclus et lésés. »

Selon la stratégie, « les données et les éléments d'information sont des outils indispensables permettant d'identifier et de traiter les inégalités, et [favorisant] l'action corrective vers l'élimination du racisme et de la discrimination. »

Une étape majeure pour répondre aux demandes croissantes de meilleures données désagrégées afin de mettre en lumière les diverses expériences des personnes en matière de criminalité est l'Initiative de collecte de données déclarées par la police sur les identités autochtones et racisées de Statistique CanadaNote de bas de page 28Note de bas de page 29

L'importance des renseignements supplémentaires et de la contextualisation lors de l'utilisation de l'IGC

Comprendre la criminalité dans une région, et particulièrement l'IGC, nécessite de comprendre les crimes qui touchent la région et les facteurs qui influent sur la criminalité et les signalements.

Chaque année, lorsque les renseignements déclarés par la police sont publiés par Statistique Canada, un ensemble de tableaux de données et d'analyses sont accompagnés de notes de bas de page détaillées et d'explications pour mieux comprendre les changements dans les modèles de criminalité. Ceux-ci sont élaborés en partie grâce à des discussions et des suivis avec les services de police individuels pour mieux comprendre l'évolution des pratiques policières, des initiatives, des tendances locales en matière de criminalité ou d'autres facteurs pertinents partout au paysNote de bas de page 30.

Les articles analytiques publiés par Statistique Canada offrent un contexte supplémentaire concernant les tendances plus larges de la criminalité, telles que les changements dans les crimes contre les biens et les crimes haineux au début de la pandémie de COVID-19, ou l'exploitation sexuelle des enfants en ligne.

Les notes de bas de page dans les tableaux de données et les analyses fournissent des renseignements importants sur les changements dans la législation, les stratégies policières locales, ou les types de crimes complexes commis au moyen de la cybertechnologie ou d'éléments du crime organisé.

Pour des renseignements contextuels supplémentaires au sein et en dehors du système de justice pénale, veuillez consulter les ressources suivantes :

Où obtenir de plus amples renseignements?

Pour obtenir de plus amples renseignements sur l'Indice de gravité de la criminalité et les autres statistiques sur les crimes déclarés par la police, veuillez communiquer avec le Centre canadien de la statistique juridique et de la sécurité des collectivités à statcan.ccjcss-ccsjsc.statcan@statcan.gc.ca.

Les tableaux de données à divers niveaux géographiques sont également accessibles gratuitement sur le site Web de Statistique Canada.

Les rapports méthodologiques suivants sont accessibles sur le site Web de Statistique Canada ou auprès du Centre canadien de la statistique juridique et de la sécurité des collectivités (rapports internes) :

  • Cormak, A. et Tabuchi, T. (2020). Updating the Police-Reported Crime Severity Index: Calculating 2018 Weights. Statistique Canada. Document de travail SSMD-2020-01F.
  • Babyak, C., Campbell, A., Evra, R. et Franlkin, S. (2013). Mise à jour des poids de l'Indice de gravité de la criminalité déclarée par la police : Améliorations apportées à la méthodologie. Statistique Canada. Document de travail HSMD-2013-005E.
  • Babyak, C., Alavi, A., Collins, K., Halladay, A. et Tapper, D. (2009). La méthodologie de l'Indice de gravité de la criminalité déclarée par la police. Produit no HSMD-2009-006E/F au catalogue de Statistique Canada.
  • Wallace, M., Turner, J., Babyak, C. et Matarazzo, A. (2009). La mesure de la criminalité au Canada : présentation de l'Indice de gravité de la criminalité et des améliorations au Programme de déclaration uniforme de la criminalité. Produit no 85-004-X au catalogue de Statistique Canada.