Hé-coutez bien! Épisode 2 - Au bord de l'effondrement : les répercussions de la COVID-19 sur les familles canadiennes - Transcript
Témoignage - Marie-Pierre Annik : Je m'appelle Marie-Pierre et j'enseigne en maternelle-jardin. Un des aspects difficiles cette année était l'incertitude à savoir si on allait être en personne ou en ligne d'une semaine à l'autre. En maternelle-jardin, nous avons une approche basée sur l'apprentissage par le jeu, par la manipulation. En virtuel, ce mode d'apprentissage devient quasi-impossible car nous ne sommes pas près de nos élèves pour les accompagner dans leur jeu. Ça fait maintenant 2 ans que nous sommes mi-présentiel, mi-virtuel et certains enfants ont fait tout leur apprentissage préscolaire dans ce mode donc, ils n'ont pas eu la chance de développer les habiletés sociales nécessaires pour leur parcours scolaire.
Ce qui m'inquiète, c'est que certains élèves qui étaient forts en classe semblent avoir régressé en ligne, soit par manque d'attention ou à cause qu'ils ne font pas de travail à la maison. Je crains que ceci va directement affecter tous les élèves l'an prochain et que les enseignants auront beaucoup de rattrapage à faire.
Témoignage - Manon Harvey, professeure en maternelle : Bonjour, je m'appelle Manon Harvey. J'enseigne dans la province du Manitoba. J'enseigne au niveau de la prématernelle. Nous avons 16 élèves toute la journée, 5 jours/semaine. Ce que j'ai trouvé était le plus gros défi cette année, est que la division scolaire nous a demandé d'enseigner à l'extérieur pour le mois de septembre et octobre à temps plein. À ce moment-là on a dû se trouver nous-même des façons de procéder. Nous avons pu acheter des tentes pour au moins avoir un abri au-dessus de nous. Nous avons dû un peu apprendre sur le tas comment adapter nos pédagogies tout en restant à l'extérieur et en pouvant permettre aux enfants d'apprendre le français ainsi que la sociabilité et le partage et tout ça, à travers le jeu.
Générique : Vous êtes à l'écoute de Hé-coutez bien!, un balado de Statistique Canada où nous faisons la connaissance des personnes derrière les données et découvrons les histoires qu'elles révèlent. Je suis votre animatrice Alexandra.
Alexandra Bassa : En mars 2020 les choses ont changé pour le monde entier et la vie est devenue beaucoup plus compliquée. Fini les sorties en groupes, on travaille à distance lorsque c'est possible, les masques ont pris leur place dans notre quotidien et au fur et à mesure on a fini par s'habituer à ces restrictions. Mais pour les enfants d'âge scolaire, les perturbations causées par la pandémie ont été particulièrement importantes.
Quand on est enfant nos préoccupations sont simples. Aller à l'école, apprendre à lire et à écrire et surtout se faire des amis et s'amuser, sans soucis. Mais avec la pandémie les meilleurs moments de l'école ont été un peu différents. Pour certains, l'école s'est déroulée partiellement ou entièrement à distance, en ligne devant un écran. Même lorsque l'école était possible en personne, la situation n'était pas idéale. Fini les récréations passées à s'amuser en groupe, il faut plutôt penser à la distanciation physique en salle de classe, et porter des masques toute la journée. Mettez-vous à la place d'un enfant pour un moment. Les choses changent du jour au lendemain et les adultes autour de vous n'ont pas toujours toutes les réponses en ce qui concerne combien de temps les restrictions seront en place. Pour un enfant, ça peut sembler interminable.
C'est ce dont nous parlerons aujourd'hui. Comment la pandémie a-t-elle particulièrement affecté les enfants. Quelles ont été les répercussions immédiates et quelles seront les répercussions à long termes?
Vous allez entendre plusieurs voix aujourd'hui. Vous avez déjà entendu des témoignages anonymes au début de l'épisode et vous en entendrez d'autres, donnés par des éducateurs et des mentors qui ont été témoins de ces répercussions. J'aimerais d'abord vous présenter la Dre Hilary Myron, pédiatre à l'Hôpital Montfort, et CHEO, qui a nous a fait part de ce qu'elle a pu observer au cours de ses entretiens avec ses jeunes patients.
Alexandra Bassa : À quoi ressemble la profession de médecin en temps de pandémie?
Dre Hilary Myron (Médecin en pédiatrie, Hôpital Montfort, CHEO, Faculté de médecine Université d'Ottawa) : Ce temps de pandémie, c'est un temps intense. Je vois mes collègues qui sont épuisés dans les soins intensifs, mais pour moi, comme pédiatre, comme médecin pour les enfants, j'ai les mêmes problèmes, les mêmes questions qui viennent à mon bureau, mais elles sont amplifiées. Il y a plus de demandes en soins de santé mentale, mais moins de ressources qui sont disponibles pour les enfants qui ne sont pas au centre de la pandémie.
Pour moi, un autre élément qui est différent, c'est que je suis dans un temps de distanciation physique de mes patients. Dans la pédiatrie, nos patients ne sont pas toujours capables d'expliquer leur état physique en mots. Alors, je me fie sur mes interactions en personne avec les enfants, de les examiner, de jouer avec, d'agir avec eux dans une façon plus physique. Alors le médecin, avec les enfants ne s'adapte pas si bien aux distanciations. Finalement, en pédiatrie, il y a beaucoup d'incertitudes, de comment ça va affecter mes patients. On manque d'expérience dans les soins médicaux pour le COVID, et ça c'est vrai pour tous les médecins dans cette pandémie. Mais de plus que ça, on manque les évidences pour comment la distanciation sociale, les changements, l'éducation, la vie quotidienne va affecter le développement d'un enfant dans toute durée de sa vie.
Alexandra Bassa : On sait maintenant que les enfants ne font pas partie d'un groupe d'âge qui est particulièrement à risque pour le virus, donc la plus grande menace pour les enfants n'est pas nécessairement le virus, mais plutôt les mesures que nous avons dû prendre pour arrêter la propagation du virus. Donc, pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ça?
Dre Hilary Myron : C'est certain qu'au début on ne savait pas comment les enfants seront affectés et que les infections respiratoires chez les enfants sont d'habitude communs, sévères, alors c'était approprié de penser que les enfants seront très affectés aussi, mais avec le temps, avec les données, on est beaucoup plus confiants que les enfants ont été relativement épargnés des effets directs de l'infection qui est fait par le virus du COVID-19.
Alors, j'ai cherché des données sur ça, selon la Société canadienne de pédiatrie, dans un document qu'ils ont publié en mai 2021. Ils ont publié les données que les enfants âgés de zéro à dix-neuf ans représentaient 19 % des cas au Canada du virus, mais la proportion d'hospitalisation était beaucoup plus basse pour les enfants, 1,8 %, et que les admissions aux soins intensifs, celui qui nous a fait peur de déborder nos institutions médicales, nos hôpitaux, étaient beaucoup plus bas, 1,3 %. Et que les décès étaient très, très rares chez les enfants, 0,04 %. Alors, ça, c'est très rassurant pour les enfants, pour les parents que les effets médicaux sont moins sévères chez les enfants. Lorsqu'on sait que les enfants vivent moins les effets physiques de COVID comme tels, mais que leurs vies sont beaucoup plus perturbées même, je te dirais que les adultes. Leur travail de chaque jour c'est d'aller à l'école, de grandir, et tout ça a été perturbé dans une façon très significative. Leurs activités de loisir, les connexions avec les réseaux de soutien sont absolument différents durant les derniers 18 mois.
Alors, je vais dire que le manque ou le changement dans leurs activités quotidiennes ont certainement des effets sur leur développement intellectuel, émotionnel et on ne sait pas s'ils sont des effets réversibles ou non. On sait qu'il y a des effets physiques aussi à cause de cette isolation, cette distanciation sociale, et on a vu que les changements, comme les pertes de poids ou les gains de poids ou les changements de comment les enfants mangent ou jouent sont cumulatifs.
Témoignage - Zoe : Bonjour je m'appelle Zoe, j'enseigne dans une classe de maternelle en Ontario, Canada. J'étais vraiment chanceuse d'enseigner pendant une pandémie. On avait plusieurs défis cette année dans la classe et dans une classe virtuelle. Un des plus grands, c'était la distanciation physique dans une classe de maternelle. Ce n'était pas toujours possible lorsque les enfants sont 4 et 5 ans. Il ne sait pas comment garder la distance entre eux. On était capable de créer des groupes. Ils jouaient avec leur groupe dans la classe dans une section juste pour eux, puis quand on était dehors, ils avaient plus de chances, d'opportunités de jouer avec leurs autres amis dehors.
Narration : Les résultats de la nouvelle Enquête canadienne sur la santé des enfants et des jeunes indiquent que 4 % des enfants et des jeunes, âgés de 1 à 17 ans avaient une santé mentale passable ou mauvaise en 2019, un an avant la pandémie, comme cela a été déclaré par leurs parents. Les résultats de l'enquête ont également permis de voir qu'une mauvaise santé mentale chez les enfants et les jeunes était liée à des résultats sociaux et à des résultats en matière de santé défavorables, y compris des résultats scolaires plus faibles et de la difficulté à se faire des amis.
Les résultats d'une analyse fondée sur des données obtenues par approche participative indiquent que la santé mentale perçue des jeunes canadiens s'est détériorée pendant la pandémie; plus de la moitié des participants âgés de 15 à 17 ans ont déclaré que leur santé mentale était un peu moins bonne ou bien moins bonne qu'avant la mise en œuvre des mesures de distanciation physique.
Comment trouver l'équilibre entre les besoins contradictoires de la pandémie? D'une part, vous devez freiner la propagation du virus et d'une autre, vous devez tenir compte du bien-être des enfants, dont le développement et l'éducation sont beaucoup plus affectés par cette nouvelle réalité que représente l'apprentissage à distance. J'ai demandé au docteur Myron si elle trouvait difficile de devoir jongler ces réalités?
Dre Hilary Myron : Certainement. Où d'une part, c'est certain que le Canada et tout le monde entier on a dû freiner la propagation du virus, mais ça fait des changements fondamentaux dans notre société et se tourner vers un apprentissage virtuel n'est pas une façon prouvée chez les enfants d'avoir une éducation. Alors on doit s'attendre, avec tous les changements en société, entiers, qu'on va avoir des conséquences imprévues, et de mon côté, je suis intéressée au sujet des conséquences imprévues chez les enfants. On ne sait pas comment les enfants des âges différentes sont capables d'apprendre en virtuel, on n'a pas encore développé des pratiques meilleures au sujet de ça. Et je me demande au sujet des enfants avec des besoins spéciaux, il y a certains qui ont eu des bénéfices avec les changements, mais il y a aussi beaucoup plus qui ont des difficultés plus aigües. C'est une contradiction un peu difficile que les enfants vivent les conséquences plus aigües pour protéger la société en entier.
Alexandra Bassa : Et quelles sont les différences marquantes que vous avez remarquées dans l'état de vos patients avant la pandémie et maintenant?
Dre Hilary Myron : Il y a plusieurs aspects de cette réponse et ma perspective est basée dans la sorte de pratique médicale que je fais, mais quelques thèmes que je vois.
Chez les familles avec les enfants avec des besoins médicaux complexes, qui font aussi une grande partie de ma pratique, comme par exemple, la paralysie cérébrale, ces familles-là ont moins d'accès aux thérapies en personne et il y a des essais de remplir ces lacunes avec des thérapies virtuelles, mais avec des impacts ou bénéfices incertains encore. Chez les enfants de l'âge scolaire, je vois ceux avec l'anxiété, les troubles comportementaux à l'école, avant la pandémie, qui se présentent peut-être avec une amélioration des symptômes. Alors, dans certains cas, j'ai vu une diminution des difficultés, mais j'ai aussi vu avec mes enfants d'âge scolaire que les enfants qui ont besoin de structures que les familles ne peuvent pas donner, qu'ils ont des difficultés plus aigües. Ils manquent leurs amis, tous les enfants, ils manquent leurs amis, les sports, les choses qui font rouler la journée.
Alexandra Bassa : Les enfants qui signalaient déjà des défis en matière de santé mentale avant la pandémie peuvent être particulièrement vulnérables. En 2019, 17 % des enfants et des jeunes âgés de 5 à 17 ans ont déclaré une santé mentale passable ou mauvaise et 5 % des enfants et jeunes âgés de 5 à 17 ans déclaraient avoir reçu un diagnostic de troubles anxieux.
Selon les résultats du questionnaire « Répercussions de la COVID-19 sur les Canadiens - votre santé mentale ». Les jeunes étaient les plus susceptibles de déclarer que leur santé mentale est moins bonne depuis l'instauration des mesures d'éloignement physique. Près des deux tiers des participants de 15 à 24 ans ont déclaré que la situation avait une incidence négative sur leur santé mentale. Les personnes faisant partie de ce groupe d'âge étaient également les plus susceptibles de déclarer des symptômes correspondant à une anxiété modérée ou sévère.
Dre Hilary Myron : Et spécifiquement chez les adolescents, on voit définitivement plus d'anxiété qui était quelque chose qu'on voyait avant la pandémie, mais qui est plus aiguë maintenant.
Alors, dans ma pratique, j'ai commencé à demander à mes familles c'est quand la dernière fois que tu es allé dehors? Et des fois la réponse, soit des jours ou même une semaine. Ceci est clairement un risque à la santé, la santé émotionnelle, physique, et pour toutes les raisons que j'ai déjà décrites, ça va empirer l'état physique et émotionnel de l'enfant. Leurs jours sont très dépendants sur leur routine : le sommeil, l'alimentation, le bien être de santé mentale et développement ne peut pas procéder dans une façon normale si on n'a pas des activités de base, comme aller dehors.
Alors, ça a l'air simple, mais ça c'est une des interventions que j'ai commencé à faire durant la pandémie, c'est de conseiller mes familles que c'est sécuritaire d'aller dehors et pas juste sécuritaire, c'est nécessaire pour leur santé. Et ça, ce n'était pas quelque chose que je devais conseiller si fréquemment avant cette pandémie
Narration : Avec la fermeture des écoles et l'arrêt de plusieurs activités, les enfants étaient plus ou moins confinés à la maison. Pour les enfants déjà à risque de violence familiale, l'école n'était plus disponible comme espace sécuritaire. En 2019, on a dénombré 69 691 enfants et jeunes (âgés de 17 ans ou moins) ayant été victimes d'affaires de violence déclarées par la police au Canada. Parmi ces victimes, 22 299, avaient été agressés par un membre de leur famille.
Alexandra Bassa : Alors, l'école n'est pas seulement un lieu où les enfants apprennent à lire et à écrire. C'est aussi tout un réseau et un système de soutien composé d'amis, d'enseignants, de mentor et d'autres professionnels et des personnes de confiance en général. Pouvez-vous nous parler de ce que signifie la perte de ce système de soutien pour un enfant ?
Dre Hilary Myron : Tous les enfants ont un droit de vie en sécurité et ça, c'est un… il y a un système de soutien ici au Canada de soutenir les familles qui sont vulnérables, qui ont des défis et sans une communauté pour prendre soin des enfants, on ne peut pas vivre cette réalité. Alors absolument, je suis inquiète quand les enfants n'ont que leur foyer, leur famille à la foyer pour donner du support. Ils ont besoin du soutien hors de juste les parents. Dans toutes les sociétés, le monde entier, il y a des adultes qui font partie des vies des enfants qui ne sont pas leurs parents.
Témoignage - Manon Harvey : Pour certaines familles on a vu aussi une difficulté financière qui pouvait se répercuter au niveau de la qualité ou de la quantité, je devrais dire, des aliments dans leur boîte à dîner.
Alexandra Bassa : Il y a plusieurs enfants qui grandissent dans des conditions difficiles, dans des foyers vulnérables ou encore qui ne se sentent pas toujours en sécurité chez eux. Pour ces enfants, l'école représente bien plus qu'un simple lieu d'apprentissage. Il y a des repas réguliers, une sécurité, des enseignants de confiance et d'autres adultes qui peuvent intervenir dans leur vie de manière positive. Voici ce que Dre Myron avait à dire sur ces enfants.
Dre Hilary Myron : Absolument. Ceux-ci sont les enfants qui me fait ruminer les soirs. Dans ma pratique, il y a une proportion significative de familles qui sont vulnérables et on sait que les enfants vulnérables ont des mesures de santé plus bas que la norme. C'est un risque pour leur santé. Avec les restrictions sur les institutions publiques et ces institutions publiques contribuent à l'égalité à la société, comme les écoles, mais pas juste les écoles, tous les services sociaux, comme les bibliothèques mêmes. Ils sont tous fermés, leurs accès sont limités.
Alors, directement sur le sujet de sécurité chez les enfants, on a déjà des données qui sont très inquiétantes au sujet d'abus. Par exemple, en 2020, l'Agence de santé publique du Canada a publié un rapport qui élabore sur les traumatismes crâniens non accidentels chez les nourrissons. Comme une cause de décès importante, on savait ça toujours, mais depuis le commencement de la pandémie, on suspecte que les taux sont beaucoup plus élevés.
Mon hôpital d'enfant local à Ottawa, CHEO, en concert avec la Société de l'aide d'enfance et Santé publique d'Ottawa, ont sonné une alarme au sujet de ça, une augmentation depuis septembre 2020. Ils ont rapporté un double d'enfants de moins d'un an admis pour cause de maltraitance à l'hôpital et plus spécifiquement en raison de fractures et de traumatismes crâniens. Il y avait même une pédiatre, Dre Michelle Ward, une pédiatre spécialiste en maltraitance d'enfants qui a communiqué ce message au public en disant que dans ses 16 années à CHEO elle n'a jamais vu ces taux-là. Ça me fait très triste. Par le temps qu'on ait une image un peu plus claire de comment les restrictions de la pandémie va avoir, comment ces restrictions vont avoir effet sur les taux d'abus d'enfants, des dommages irréparables seront faits, et ça me fait triste.
Narration (Alexandra Bassa) : Et les bébés dans tout ça? Il y a plusieurs personnes qui ont dû rencontrer les nouveau-nés de leurs amis et les nouveaux membres de leur famille à distance, ou qui n'ont pas encore pu les rencontrer, et c'est très difficile. Les membres de la famille ne peuvent pas venir rencontrer ces nouveau-nés et c'est triste de ne pas avoir pu apprécier ces premiers moments en personne. Mais est-ce qu'il y a un risque de conséquences plus graves au niveau de leur développement?
Dre Hilary Myron : Je reçois des questions fréquentes de mes patients au sujet de ça, l'anxiété sociale, l'anxiété de séparation de ses parents, mais c'est trop tôt de savoir. Je sais que les organismes au Canada desquels j'ai parlé comme, la collaboration avec les enfants d'abord, la Société canadienne de pédiatrie demande des recherches dans exactement ces questions. Mais de mon connaissance, on n'a jamais eu dans notre vie moderne un événement comme tel qui a eu ces effets sur les nourrissons, les jeunes enfants. Chez les nourrissons, il y a plus d'isolation de la famille, plus d'anxiété chez les parents, où chercher les ressources. Même avec quelque chose très concret comme les difficultés d'allaitement qui sont très commun, les parents ont le sens qu'il n'y a pas les ressources pour les aider. Il y a beaucoup de rapports de mes patients que les ressources qui sont là sont plus plein, c'est difficile d'y accéder, les marraines d'allaitement, leurs horaires sont planifiés pour deux semaines en avant. Alors, les interventions de lesquelles elles ont besoin dans une façon immédiates ne sont pas toujours disponibles.
Témoignage - Manon Harvey : Au niveau de mes inquiétudes, un peu...pour les enfants, c'est que vu les circonstances de COVID, nous avons dû tenter de garder les enfants un peu séparés l'un de l'autre, même si nous étions à l'extérieur. Ce qui a pas permis aux enfants d'apprendre à autant partager que nous l'aurions voulu, que nous pouvons gérer à l'intérieur habituellement. Nous avons aussi dû faire attention au contact direct que nous avons avec les enfants. Et sachant que les enfants de cet âge ont besoin de beaucoup beaucoup de réconfort autant émotionnel que physique, puisque c'est généralement la première fois qu'ils vont à l'école ou qu'ils ne sont pas avec leur parents ou à la garderie et qu'ils doivent partager l'attention des adultes. On a dû limiter tout ça et on a vu que ça pouvait créer chez certains enfants une certaine anxiété.
Narration (Alexandra Bassa) : Lorsque j'ai demandé à la Dre Myron quelles étaient les différences dans les préoccupations de ces plus jeunes patients par rapport à celle de ces patients plus âgés, elle a préféré se concentrer sur le point commun qui ressort dans les préoccupations de tous ces patients.
Dre Hilary Myron : J'aimerais souligner que les jeunes patients et les adolescents, ce qui leur manque, c'est la socialisation. Et la socialisation c'est une tâche développementale chez les enfants et les enfants ont vraiment deux choses à faire : grandir et développer. Les détails des tâches changent durant leur vie d'enfant, mais la tâche est encore là. Alors, les préoccupations de mes patients, de jeunes enfants, ils me demandent comment est-ce qu'ils vont développer langage sans voir les lèvres avec tout le monde qui portent des masques. Et malheureusement, je n'ai pas de réponse pour ça.
Témoignage - Manon Harvey : Également, le peu de temps en septembre et octobre que nous étions à l'intérieur, nous devions porter un masque. Et par la suite pendant l'hiver, nous avons dû porter le masque aussi. Ce que nous avons réalisé, c'est que les enfants n'étaient pas capables autant de lire les expressions de notre visage donc ne pouvaient pas toujours savoir les émotions que nous essayons de passer et pour eux c'est quand même une réalité très importante.
Narration (Alexandra Bassa) : Nous avons déjà parlé de l'importance de la socialisation pour le développement des jeunes enfants. Par contre, en ce qui concerne les ados, il y a plusieurs évènements sociaux qui font partie de l'expérience adolescente. Ils ont dû manquer des étapes importantes de leurs vies et des rites de passage comme des graduations de l'école primaire à l'école secondaire, des graduations du secondaire aux études supérieures, des bals de finissants et d'autres événements sociaux. Comment est-ce que la perte de ces activités sociales ou ces activités en général affectent leur développement?
Dre Hilary Myron : On sait chez les adolescents que les rites de passage sont très importants pour leur estime de soi et pour atteindre leur prochain niveau de développement. Alors, c'est une lacune importante. Comment est-ce que ça va les affecter comme adulte? Je ne peux pas te dire, mais c'est certaine que ça a des impacts importants. Tout le monde peut penser à leur vie à l'école secondaire et on les rappelle avec des images, des photographies dans nos têtes et on a des années et des enfants qui vont manquer ça et je suis triste pour eux.
Pour les adolescents, la socialisation, c'est leur but. Ça, c'est qu'est-ce qu'ils doivent faire en adolescence. Et puis c'est gravement limité durant cette pandémie. Alors, chez les adolescents, je me demande si ça change les tendances de comment ils socialisent. Est-ce que ça va avoir des effets à long terme? je ne sais pas.
Témoignage 2 - L'école virtuelle - les effets sur les enfants : L'année scolaire a déjà commencé avec beaucoup d'incertitudes. Pendant l'apprentissage à distance, mes élèves ont eu de la difficulté à participer aux discussions de classe, ce qui n'était jamais un défi en personne. Plusieurs ne mettaient pas leur caméra pendant les leçons, alors c'était très difficile à savoir s'ils complétaient vraiment leurs tâches, ou s'ils jouaient un jeu ou regardaient une vidéo sur YouTube.
Je ne m'attendais surtout pas à un retour à l'apprentissage à distance en mi-avril. Cette-fois ci, mes élèves avaient l'habitude et la connaissance des routines et attentes, étant donné que c'était leur deuxième fois en ligne. Il y avait moins de motivation de la part des élèves, et j'avais plus de conversations avec les parents en ce qui concerne l'achèvement des travaux et la présence aux séances en direct.
Ma plus grosse observation de l'année c'était que les élèves ont besoin de l'apprentissage en personne. Même si certains élèves ont eu une meilleure performance en ligne, et se sont adaptés très bien avec les changements, l'interaction en personne avec leurs enseignants et leurs camarades de classe est essentielle à la santé mentale des élèves.
Témoignage - Zoe : Puis pour la classe virtuelle c'était vraiment difficile lorsque les élèves de 4 et 5 ans, les élèves de maternelle ne devraient pas être en face d'un ordinateur pendant 3 heures par jour. On a dû faire 4 sessions de 45 minutes chaque journée. Après 2 semaines les élèves ne voulaient plus le faire. Ils étaient ennuyés. Ils ne voulaient même pas jouer des jeux ou danser ou prendre une pause. C'était vraiment difficile de voir cela. Ils m'ont toujours demandé: « Madame, quand est-ce qu'on retourne à l'école? Est-ce qu'on va à l'école? Madame, l'école me manque...» pour moi j'ai joué des jeux, on a chanté des chansons, on a écouté des vidéos puis on a même joué à cache-cache sur zoom. Donc ce n'était pas toujours évident, pour le dire simplement.
Narration (Alexandra Bassa) : Pour plusieurs enfants, l'école n'était plus un endroit physique. C'était plutôt quelque chose qui se passait à l'écran. Pour les enfants qui ont commencé l'école durant l'année scolaire 2020-2021, certains l'ont commencé à l'école et l'ont terminé en ligne ou l'inverse, dans tous les cas ils ne savent pas à quoi ressemble une année scolaire normale. Plusieurs élèves étaient désintéressés par l'école à l'écran et décrochaient. Mais, quels pourraient être les effets à long terme de l'enseignement virtuel?
Dre Hilary Myron :
Je suis pas mal certaine que l'éducation virtuelle n'a jamais été jamais été testée sur les populations d'enfants si grandes que celui qui reçoivent les éducations virtuelles actuellement. Et alors, on n'a pas encore développé les meilleures pratiques. Comme parent, comme pédiatre, je me demande qui sont les enfants qui sont mieux adaptés pour cette méthode d'éducation et je me demande si ça c'est celui avec les ressources pour la technologie, une style d'apprentissage qui est adaptable, et ça, ce n'est pas tous les enfants. Je me demande aussi pour les différents âges, comme les enfants pré-alphabétisés, est-ce qu'ils bénéficent de l'école virtuelle de la même façon?
Et finalement, comme on en a déjà discuté, l'école n'est pas juste pour apprendre les habiletés de math, de lecture, certainement ces choses sont très importantes, mais c'est plutôt aussi pour la socialisation. De résoudre les problèmes entre nos pairs, nos collègues, de négocier, de savoir comment gérer nos émotions, de gérer nos frustrations, de gérer les difficultés dans une classe. Ça, c'est une mini société, et ça, c'est clé pour les enfants, d'adapter à une monde de travail pour lequel on les prépare.
Alors, je veux juste aussi rappeler que nos atteintes académiques sont directement reliées à nos capacités de faire des gains d'emplois et je voulais juste rappeler de certains rapports qui sont sortis sur cet thème. Le science table Ontario a écrit un rapport récemment au sujet des fermetures d'école en Ontario en disant que chaque mois manqué à l'école est prévoyé à causer une perte de gain d'emploi dans la vie vers 1 %. Le coût total de ça juste en Ontario pourrait être dans les trillions de dollars. Ces coûts-là ne sont pas distribués dans une façon égale. Celui qui sont déjà plus à risques vont souffrir plus et ça, c'est un thème de cette pandémie. Ça va plus empirer les inégalités dans notre société qui est vraiment une des conséquences les plus aiguës pour moi de cette pandémie. Soit médicale, avec la perte de vie plus significative chez les populations vulnérables, le monde entier, mais aussi les pertes de gains futurs de ces mêmes populations et leurs enfants.
Narration (Alexandra Bassa) : En effet, toutes les familles n'ont pas les mêmes moyens ou les mêmes ressources pour pouvoir s'adapter à l'apprentissage à distance.
J'ai demandé à Dre Myron de nous donner des exemples de comment les groupes vulnérables sont particulièrement affectés par ces mesures d'apprentissage à distance.
Dre Hilary Myron : Je vois que les effets de la situation socio-économique d'un enfant ont un impact sur le bien-être physique et le bien être mental de l'enfant. L'impact académique pour les familles vulnérables, les populations vulnérables, les foyers à faibles ressources sont plus aigu. Un parent qui doit être présent à la maison pour surveiller l'enfant pendant ses cours en ligne et surtout les jeunes enfants qui soient, n'est pas capable d'aller travailler ou va manquer plus de travail. Certains parents n'occupent pas des postes qui leur permettent de faire ça, d'être plus flexibles, de travailler des heures plus flexibles. Certaines enfants n'ont pas l'accès à l'internet ou un ordinateur.
Je pense que, une autre chose à ajouter, c'est que, c'est un effet cumulatif sur les enfants. Ce n'est pas quelque chose qui va… Si ça dure plus longtemps, ça va avoir un effet plus aigu sur les enfants que si c'était quelque chose de bref. Et c'est certain que quand tout a commencé, on a pensé qu'on allait revenir à la vie normale plus vite qu'on a pu faire. Et avec le temps, ces effets sont de plus en plus profonds.
Narration (Alexandra Bassa) : Le nombre d'appareils connectés à Internet, disponibles dans le ménage pourrait également avoir une incidence sur les possibilités d'apprentissage, compte tenu de la demande accrue d'accès à Internet de la part des frères et sœurs et des parents qui peuvent travailler à domicile. Dans l'ensemble, 58 % des ménages qui avaient accès à Internet avaient moins d'un appareil par membre du ménage - ce qui n'est pas assez pour permettre à tous les membres du foyer de travailler ou de faire leurs devoirs, en même temps. Parmi les ménages faisant partie du quartile de revenu le plus bas, 63,0 % des ménages avaient moins d'un appareil pour chaque membre du ménage, comparativement à 56 % des ménages faisant partie du quartile de revenu le plus élevé. Près du quart des ménages du quartile de revenu le plus bas ont déclaré utiliser uniquement des appareils mobiles pour accéder à Internet, soit trois fois plus que la proportion des ménages du quartile de revenu le plus élevé.
Alexandra Bassa : Pouvez-vous donner des conseils aux parents qui doivent faire face aux effets négatifs de l'augmentation du temps d'écran?
Dre Hilary Myron : Ça c'est une question assez difficile parce que les écrans ont un rôle ici qui est important. Je me fie sur les conseils de la société canadienne de pédiatrie pour conseiller les parents au sujet des temps sur les écrans. On sait que les écrans ne sont pas avisés pour les très jeunes enfants. En moins de 2 ans, on les évite le plus possible. On sait que les enfants à l'école ont besoin de leurs écrans. Alors d'après moi, je ne compte pas ce temps devant l'écran comme le temps de loisir. Par contre, si un enfant ne bouge pas, ça, c'est quelque chose qu'on doit corriger. Alors le plus de temps qu'on a devant l'écran, si c'est pour le loisir ou pour l'éducation, je conseille les parents d'aussi prendre en tête les temps d'activité physique. On a besoin d'un équilibre.
Narration (Alexandra Bassa) : L'apprentissage virtuel a exacerbé les inégalités. En 2018, avant la pandémie, environ 60 % des élèves âgés de 15 ans avaient des directeurs d'école jugeant alors que leurs écoles disposaient de ressources suffisantes pour soutenir un enseignement à distance.
Par contre, le degré de préparation entre les écoles et les élèves était inégal dans l'ensemble du pays et des écarts ont été relevés entre les établissements d'enseignement canadiens socio économiquement privilégiés et les établissements défavorisés. Par exemple, environ 88 % des élèves d'écoles défavorisées sur le plan socioéconomique ont déclaré avoir accès à un ordinateur à la maison, par rapport à 98 % des élèves d'écoles socio économiquement privilégiés.
En 2018, bien que seulement 1,2 % des ménages ayant des enfants n'avaient pas accès à Internet à la maison, ce pourcentage est un peu plus élevé pour les ménages dans les 25 % inférieurs de la répartition du revenu (4,2 %) que pour les ménages se situant dans les 25 % supérieurs de la répartition (0.2%).
Alexandra Bassa : Pour les parents dont les enfants n'apprennent pas bien en ligne sur Zoom, et ça doit être le cas pour la plupart des jeunes, est-ce que d'un point de vue, peut-être d'un point de vue plus médical, est-ce qu'il y a un risque pour ces enfants pour qu'ils prennent… qu'ils prennent du retard l'année prochaine?
Dre Hilary Myron : On ne sait pas. Je vais être très clair qu'on ne sait pas si les enfants vont apprendre mieux en ligne ou pire en ligne. Je pense que les données ne sont pas là, en disant que je ne suis pas expert en éducation.
Mais, oui, il y a définitivement celui qui commence à exprimer des inquiétudes au sujet des lacunes qui seront à long terme et on ne sait pas. Alors comme pédiatre dans un bureau qui voit souvent les petits enfants, je me demande si on a des délais, en apprendre l'alphabétisme, l'écriture, est-ce que ça va empirer des retards à la vie longue, ou est-ce qu'on se rattrape? Oui, les enfants ont des cerveaux fantastiques, les enfants s'adaptent bien. Ça, c'est une des qualités des enfants et une des raisons que j'aime aussi être une pédiatre, mais à quel point est-ce qu'on peut les pousser? et à quel point est-ce qu'on est content à expérimenter avec ça ? Ça c'est toute une génération et d'habitude, les changements qu'on fait, on les fait dans une façon petit à petit. Mais ça, c'est un changement très holistique et comme j'ai dit avant, on va avoir des conséquences qu'on ne peut pas prévoir.
Alexandra Bassa : En tenant compte de tout ce que vous observez chez vos patients tous les jours, est-ce que vous diriez que c'est le bien-être mental des enfants ou le bien-être physique qui est le plus préoccupant?
Dre Hilary Myron : C'est absolument les deux, comme ils sont reliés. Je suis bien moins inquiète sur les maladies physiques non diagnostiquées, malgré le fait qu'on a vu un peu ça au commencement de la pandémie avec une hésitation de présenter pour les soins aigus à l'urgence, mais pour la plupart, c'est mieux maintenant. On a vu une petite augmentation des cas de cancer ou de diabète type 1 chez les enfants qui ont présenté un peu plus tard, mais je pense que c'est beaucoup mieux maintenant avec l'éducation.
Et les enfants n'ont pas besoin de surveillance pour les maladies physiques comme les adultes, comme les surveillances pour le cancer du sein ou des intestins chez les adultes, mais comme j'ai dit déjà, les tâches d'enfants sont de grandir et de développer. Alors la surveillance chez les enfants, c'est de surveiller leur développement et leur croissance et on ne sait pas ce qui est normal dans ce contexte d'isolation sociale et s'ils vont rattraper des lacunes et quand.
Alexandra Bassa : Dans un article d'opinion que votre collègue a écrit pour le Ottawa Citizen, on parle de stress toxique. Pourriez-vous nous expliquer ou expliquer aux auditeurs ce que ça veut dire et nous donner des exemples de ces effets sur les enfants?
Dre Hilary Myron : Alors, les exemples du stress toxique, c'est l'exposition des enfants aux choses comme la violence, insécurité de domicile, l'insécurité alimentaire, un manque de routine et certainement les abus. On rappelle que un sur trois adultes peut rappeler de l'abus dans leur passé, et ça c'est un numéro assez étonnant.
Alors le stress toxique es
t l'effet cumulatif de ces défis chez les enfants qui contribuent à comment cet enfant va répondre au stress au futur. Et notre vie est plein de stress. On ne peut jamais protéger de ça. Alors, c'est comment on s'adapte et les enfants qui ont vécu les stress toxiques ont souvent des mal adaptations au stress au futur. Ces stress toxiques sont associés aussi avec moins de stabilité économique et plus de défis médicals au futur.
Alexandra Bassa : Dans nos recherches, nous avons remarqué que plusieurs pédiatres ont mentionné le fait qu'il y avait une tendance à la hausse dans l'apparition des troubles alimentaires chez les enfants, en lien avec la pandémie. C'est assez surprenant comme constat. J'ai demandé à Dre Myron de nous en dire un peu plus sur ça.
Quel est le lien entre la pandémie et les troubles alimentaires?
Dre Hilary Myron : Je ne suis pas expert en trouble alimentaire, mais ce que je sais, c'est que les enfants qui ont une tendance à un trouble alimentaire sont ceux qui ont des tendances plus perfectionnistes. Celui qui sont plus attirés aux routines. Et tout ça est perturbé durant cette pandémie. En plus, ils sont à la maison, sans les influences dans le monde vrai -- tout est sur l'internet et on sait que ça a une influence particulier chez les adolescents, les enfants aussi vers les images du corps non réalistes et non représentatives de la réalité.
Alors en manquant cet contrôle sur leus activités normales -- le manque de sports, des clubs, des autres activités avec la socialisation -- les enfants qui sont déjà vulnérables à ces troubles se présentent plus fréquemment avec ces problèmes. Ça, c'est mon propre théorie de pourquoi on a vu des augmentations dans les taux, mais la question de est-ce qu'on a vu les augmentations des taux des troubles alimentaires, la question est bien répondue. La réponse est oui, on a vu plus d'hospitalisations et derrière chaque hospitalisation, il y a des enfants qui n'ont pas eu besoin d'une hospitalisation, mais qui ont eu besoin de traitements et de support.
De l'autre côté, même s'il n'y a pas un diagnostic d'un trouble alimentaire diagnostiqué, où les enfants ils restrictent ce qu'ils mangent, on voit les changements dramatiques sur les courbes de croissance. Comme les prises de poids qui ne sont pas sains. Je me demande si c'est relié au manque de routine, d'activités physiques et aussi plus de troubles de l'humeur.
Témoignage - Manon Harvey : Et aussi, l'autre grand anxiété que nous avons vue chez les enfants c'est que ils viennent à l'école anxieux...beaucoup plus anxieux que normalement. Nous pensons que c'est probablement parce qu'ils vivent l'anxiété qui est vécue à la maison, de par leurs parents, de par les changements que COVID a donc apporté à chacune des familles.
Narration (Alexandra Bassa) : Nous avons vu que plusieurs de vos collègues de médecine ont des inquiétudes par rapport aux symptômes alarmants qui se présentent chez les jeunes enfants, indiquant une mauvaise santé mentale, comme l'anxiété et la dépression clinique. Pour les parents, quels sont les signes à surveiller?
Dre Hilary Myron : Certainement. C'est de surveiller l'état d'humeur de votre enfant. Est-ce qu'ils ont encore le plaisir à jouer, à manger, les changements dans leur sommeil, les changements dans leur alimentation. Et aussi, chez les enfants, c'est important d'être honnête et transparent avec eux, mais aussi de ne pas trop les exposer aux craintes des adultes.
Narration (Alexandra Bassa) : Une comparaison des réponses des parents avec les réponses des jeunes de 12 à 17 ans révèle que ces derniers n'ont pas souvent la même opinion que leurs parents par rapport à leur santé mentale.
Dans presque la moitié des cas, les parents ont évalué la santé mentale de leurs jeunes de la même manière que ces derniers.
Pour l'autre moitié des cas, la perception des jeunes par rapport à leur santé mentale était différente de celle de leurs parents. Quand cette perception était différente, près de deux tiers des jeunes ont évalué leur santé mentale moins positivement que leurs parents.
Ces résultats laissent entendre que les parents ne sont pas toujours conscients des problèmes de santé mentale de leurs enfants.
Alexandra Bassa : Est-ce que, selon vous, les parents sont-ils toujours conscients de l'état de santé mentale de leur enfant? Est-ce qu'il y a parfois un décalage entre la perception des parents et l'expérience de l'enfant?
Dre Hilary Myron : C'est certain que les parents ne sont pas toujours conscients de l'état de santé mentale de leurs enfants. C'est une famille dynamique, mais c'est important que les parents soient réceptifs aux enfants et à leurs inquiétudes. Les inquiétudes des enfants sont importantes et on doit tenir en tête que les enfants nous observent comme adulte et apprennent de nous, nos réactions. Alors, ils sont très sensibles au fait que nous sommes comme adulte stressés, inquiets, et comme adulte, on a une tendance de vouloir protéger les enfants d'incertitude, mais c'est important d'adresser ça avec les enfants et dire les parents ne savent pas toujours comment on va gérer le prochain défi, mais que nous sommes là pour leur protéger.
Narration (Alexandra Bassa) : Une mauvaise santé mentale peut influer sur un grand nombre de facettes de la vie d'un enfant et avoir des répercussions durables sur son développement, son rendement scolaire et sa capacité à créer des liens sociaux.
En 2019, les enfants et les jeunes ayant une santé mentale passable ou mauvaise avaient des résultats scolaires inférieurs, dans l'ensemble, à ceux des enfants ayant une très bonne ou une excellente santé mentale. Plus précisément, près d'un tiers des enfants et des jeunes de 3 à 17 ans dont la santé mentale était passable ou mauvaise avaient une note moyenne de C ou moins. Par comparaison, 9 % des enfants et des jeunes dont la santé mentale était très bonne ou excellente avaient une note moyenne de C ou moins.
Les enfants et les jeunes dont la santé mentale a été évaluée comme passable ou mauvaise par leurs parents étaient aussi plus susceptibles d'avoir de la difficulté à se faire des amis que ceux ayant une très bonne ou une excellente santé mentale. En 2019, environ le quart des enfants et des jeunes âgés de 5 à 17 ans dont la santé mentale était passable ou mauvaise avait de la difficulté à se faire des amis, par rapport à seulement 1 % des enfants et des jeunes ayant une très bonne ou une excellente santé mentale.
Témoignage - Manon Harvey : Par contre, ce qu'on réalise maintenant à la fin de l'année c'est que, tout c'est plus ou moins replacé, que les enfants sont très résilients et qu'ils ont trouvé une façon de s'adapter à tout ça et d'apprendre quand même. Et nous, on a trouvé des façons originales et créatives de quand même enseigner ce que nous avions à enseigner.
Alexandra Bassa : On entend souvent dire que les enfants vont s'en sortir, ils vont simplement s'adapter et que leur résilience est incomparable. Est-ce une bonne façon de voir les choses? Quelles sont les limites de la résilience des enfants?
Dre Hilary Myron : Je suis d'accord que les enfants vont s'en sortir, ils sont adaptables et ça c'est un élément magnifique des enfants. Ceci dit, on doit être conscient que les demandes qu'on mets sur les enfants et les adolescents sont lourdes et ils répondent à ces demandes pour protéger la société en entier et ont doit donner l'appui pour qu'ils peuvent se rattraper. Il y a une responsabilité chez les adultes de répondre à ces questions importantes que vous avez posées aujourd'hui pour qu'on peut aider les enfants à se rattraper et de devenir mieux après cet changement assez important.
Narration (Alexandra Bassa) : Voici les espoirs de Dre Myron au moment de l'enregistrement, sachant que l'épisode ne sortirait pas avant septembre 2021.
Dre Hilary Myron : Alors, j'ai beaucoup d'espoir que les écoles seront ouvertes et on va reprendre nos activités normales chez les enfants, comme les sports et les autres loisirs. Je dis ça parce que je suis très heureuse de voir les taux de vaccination, même au début de l'été 2021. On fait des progrès énormes et on sait que les vaccinations nous protègent. C'est presque un miracle de science qu'est-ce qu'on a fait et ça nous permettra de reprendre une vie normale pour nos enfants. D'après moi, comme j'ai dit, ils ont beaucoup fait pour nous comme une société et nous avons une responsabilité de reprendre leur vie normale pour qu'ils peuvent développer dans une façon la plus santé et saine possible.
Alexandra Bassa : Et qu'est-ce que vous espérez que nous allons retenir de cette pandémie?
Dre Hilary Myron : Il y a beaucoup d'aspects positifs qu'on devra retenir même dans les horreurs de cette pandémie : être créatifs avec nos réponses, être adaptable quand c'est nécessaire et comment soutenir les autres dans les temps les plus difficiles. Je suis encore positif sur le futur du différente sorte d'éducation pour les enfants, de flexibilité, de mieux choisir les bonnes façons d'éduquer nos enfants avec leurs capacités.
Alexandra Bassa : À la fin de notre entrevue, Dre Myron avait une petite annonce à faire à l'attention des parents de jeunes enfants.
Il y a-t-il un sujet que je n'ai pas abordé dont vous aimeriez discuter?
Dre Hilary Myron : C'était un peu différent, je pense à la natation. Je suis vraiment triste pour les enfants qui n'ont pas pendant deux années n'ont pas eu accès aux leçons de natation. C'est aussi quelque chose qui a un lien au sécurité des enfants. Alors, je voulais juste mettre un petit avertissement sur ça. Je voulais encourager les familles de n'oubliez pas que c'est très important pour les enfants d'apprendre comment nager.
Alexandra Bassa : Vous étiez à l'écoute de Hé-coutez bien! Un merci tout particulier à notre invitée Dre Hilary Myron d'avoir pris le temps de répondre à toutes nos questions. Merci également à Marie-Pierre, à Manon et à Zoé et à nos participants anonymes d'avoir partagé leurs expériences avec nous.
Vous pouvez vous abonner à cette émission là où vous obtenez vos balados. Vous pourrez également trouver la version anglophone de notre balado, appelé Eh Sayers. Merci de nous avoir écouté et à la prochaine!